En ce premier jour de printemps, et donc de fin d’hiver (logique), j’ai pensé qu’il serait intéressant d’apporter une conclusion à ma série de billets sur « Porter l’hiver » publiés en novembre dernier. Je me suis longuement attardée dans ces 3 billets sur les principes à respecter pour porter l’hiver et les différents systèmes, à acheter ou à bricoler, afin de rester bien au chaud avec bébé dans un même vêtement (manteau, poncho ou couverture) et permettre au portage, de ce fait, de rester le plus confortable et physiologique possible. Malheureusement, confortable et physiologique ne rime pas toujours avec pratique 🙂

Le Mamamanteau
Aujourd’hui je souhaite plutôt proposer quelques réflexions sur comment ça peut se passer, en vrai, au-delà de la belle image du bébé bien porté dans le dos, la tête dépassant de notre superbe manteau ou poncho de portage ! Parce qu’en effet, tout n’est pas toujours si simple, et les beaux principes se heurtent parfois à des problèmes matériels gênants…
C’est donc ici un retour d’expérience, avec tout ce qu’il a de subjectif et de lié à mes habitudes et matériel de portage, mais aussi au (fort ;-)) caractère et à l’âge de mon bébé porté que je compte livrer, et en profiter pour aborder les problèmes « techniques » que l’on peut rencontrer dans cette pratique, parfois sportive, du portage en hiver.

Avec moins de muscles, on peut quand même y arriver...
En préambule, je précise que ces réflexions s’appliquent particulièrement au portage dans le dos, avec un bébé en âge de beaucoup remuer – voire de demander à marcher. Ma fille a en effet eu un an en août, et marche depuis début septembre. L’hiver précédent, je ne l’avais portée que devant, attendant le redoux pour passer au dos. Et force est de constater qu’avec un bébé plus petit, et porté devant, c’est quand même plus simple 😉
Le scénario idéal
C’est l’heure de partir. On attrape son bébé, à qui on ajoute simplement un petit bonnet, éventuellement des jambières et / ou des grosses chaussettes. Pas la peine de le couvrir plus, il sera bien au chaud dans notre manteau. On le met dans l’écharpe, avec un passage au dos tout en douceur. On finalise un petit kangourou dos, c’est ce qu’il y a de plus respectueux de la physiologie. Bébé est coopératif, il lève même les genoux pour que sa position grenouille soit au top. Une fois le nouage achevé, on attrape son manteau de portage (ou poncho, ça marche aussi), et dans un geste assuré, élégant, on le fait délicatement glisser sur la tête de l’enfant, on enfile nos bras et on part. Bien sur, bébé ne remue pas trop. Et même, au bout de 20 minutes, il s’endort. On attire les regards curieux et admirateurs, certains passants viennent même nous demander la marque du manteau. Et on leur dit à quel point c’est pratique. Au moment de rentrer, bébé dort encore. Ce n’est pas grave, il n’y a pas à le réveiller pour le déshabiller : on retire simplement notre veste et il termine sa sieste dans son beau kangourou dos parfaitement ajusté.

La classe, en Suse's kinder
Le scénario catastrophe
C’est l’heure de partir. On espère que bébé n’est pas déjà en train de dormir dans notre dos, parce que sinon on est bon pour le réveiller en le descendant de l’écharpe pour lui remettre don bonnet. Sinon, on enfile justement le dit-bonnet. Comme on est prévoyant, on en choisit un qui s’attache en bas (bonnet péruvien, cagoule, ou le tout mignon capuchon Zoli). On installe bébé dans l’écharpe. Oui mais bébé a plutôt envie de faire des étirements (et ce n’est pas le seul). Si on est patient / confiant, on le met en kangourou. Sinon on transforme ça vite fait en double hamac, pour plus de sécurité (et de stabilité). On est déjà un peu essoufflé, c’est fatiguant de faire un nouage avec un bébé qui coopère pas.
On attrape le manteau de portage. On le jette en arrière pour l’enfiler. Voyant la chose arriver, bébé se jette en arrière aussi (réflexe naturel à la vue d’un grand morceau de tissu qui semble s’abattre sur lui). Le nouage en prend un coup, mais c’est pas grave, on continue l’enfilage. Le haut de la veste se prend sur le haut du bonnet, qui découvre la petite tête. Le bas reste attaché, c’est toujours ça, mais à moins d’être d’humeur à se faire insulter par tous les passants sur notre irresponsabilité de sortir bébé tête découverte par O°C, et d’avoir le moral de supporter la culpabilité d’enrhumer son propre enfant, on cherche une solution pour réajuster le bonnet. N’ayant pas les bras assez longs / souples, on se rabat une aide extérieure. Avec un adulte, le problème est vite réglé. Avec un aîné, ça peut être plus compliqué. En particulier si l’aîné, de bonne volonté, n’arrive VRAIMENT pas à remettre ce **** de bonnet. On essaie de se contrôler, et de ne pas se mettre à brailler sur le pauvre aîné, qui, objectivement, n’y est pour rien. Au mieux, il finit par réussir (au moins à peu près). Au pire, on est bon pour retirer la veste, défaire le nouage, remettre le bonnet et tout recommencer. Et si bébé était remuant la première fois, il y a fort à parier qu’il le sera encore plus la seconde. La peur au ventre que le scénario du bonnet ne se réitère, on recommence donc tout, avec un peu moins d’énergie et de plus en plus trempé de sueur. Avec un peu de chance, cette deuxième fois est la bonne. On vérifie dans une glace que bébé est couvert jusqu’au cou, parce qu’avec certains manteaux ça a plutôt tendance à tomber naturellement sous les épaules, donc on est bon pour une danse remuante afin de remonter la veste. On peut partir. On a les bras en compote, on est en nage, le bébé est surexcité, l’aîné est énervé (et en surchauffe, lui, ça fait 10 minutes qu’il attend avec manteau, gants et bonnet), mais on peut y aller. Victoire.
Une fois dehors, bébé fait comme d’habitude : il gigote. Donc le nouage bouge, normal. Et on aimerait bien le réajuster, seulement sous la veste, c’est pas possible. Ca commence à faire mal aux épaules, mais on est stoïque, et de toute façon ouvrir son manteau par 0°C, on n’est pas hyper motivé non plus. Et puis bébé a l’habitude de sortir les bras de l’écharpe. et dans le manteau de portage, et bien c’est pareil, il ne veut pas rester les bras à l’intérieur. Après quelques contorsions, qui vont encore plus défaire le serrage, il y parvient. Bon, bébé a donc les deux bras, et le cou dehors. Avec un peu de bol, on a au moins mis le capuchon Zoli, et on tente de se convaincre qu’on n’attrape pas froid par les bras. Maintenant bébé aurait bien envie de descendre. Seulement son manteau à lui, on l’a laissé à la maison (normal, il en avait pas besoin il est dans le nôtre). On déclenche donc une colère qui ne va pas arranger notre nouage, déjà mis à mal par le début du parcours. Lui faire faire quelques pas en intérieur pour le calmer est exclu, il n’y a aucune chance après ça qu’il se laisse remettre dans l’écharpe, dans le dos et dans le manteau. Et puis on n’a pas forcément le temps.
Donc on continue notre route. Les passants nous regardent un peu bizarrement, c’est vrai qu’elle est chouette notre veste de portage, mais ça nous donne une drôle d’allure ce gros boudin formé devant par le noeud (même plat) qu’on a fait… De là, plusieurs possibilités.
Soit on est en route pour déposer bébé (chez la nounou, à la crèche…), et on finit par arriver. On retire son manteau, on défait le nouage et on descend bébé. Et on part bosser, mais notre manteau a un trou dans le dos. Qu’il sera plus pratique de refermer… On prie pour n’avoir pas oublié l’insert qui va bien, ou pour les vestes à pression, on referme le tout. Notons que l’on a considérablement augmenté notre temps de transition chez la nounou ou à la crèche. La journée peut commencer, et on peut affirmer que l’on a déjà rempli nos objectifs en terme d’activité physique. Mais bon, le soir, il faudra recommencer…
Soit on rentre ensuite en intérieur avec bébé. Seulement bébé a fini par s’endormir. Quand on rentre, on aimerait bien retirer son manteau, mais on sait très bien, pour l’avoir fait de nombreuses fois, que le passage de la veste sur sa tête le réveillera. Inévitablement. Donc on garde son manteau, et bébé dans le dos. Il fait très, très chaud. Mais bébé dort… Et on tente de se convaincre que transpirer un peu ne peut pas nous faire de mal. D’ailleurs, on ne réveille jamais un bébé qui dort n’est-ce pas ? Surtout quand il dort déjà si peu…

Dans ce genre de situations, on ne prend pas de photo, on n'a pas vraiment le coeur à ça
Et en vrai ?
Il existe une infinité de scénari envisageables entre ces deux extrêmes. J’en ai vécu un certain nombre… et en ai tiré quelques conclusions 😉

Porter l'hiver, sans bonnet, c'est trop fastoche
Les facteurs de risques… et les solutions envisageables
Plusieurs éléments peuvent se révéler de redoutables ennemis à notre organisation bien huilée, et à la « théorie » du portage en hiver.
Le bonnet
C’est l’ennemi n° 1 du portage en hiver. Et je ne suis pas la seule à qui cela pose des difficultés 😉 L’idéal serait de s’en passer, mais ça, c’est impossible. Donc il faut faire avec.
Alors déjà, on oublie le bonnet juste posé sur la tête. Il a toutes les chances de ne pas résister au passage de la veste (je parle ici des vestes à deux ouvertures, je ne possède pas de modèles type Cali Calo à col large – qui facilitent sans doute cette étape mais avec lesquelles le problème reste entier en cas de perte plus tard dans le portage). Il faut donc privilégier bonnets à attaches (style péruvien par exemple), cagoule (pas trop large, sinon le passage du manteau transformera la cagoule en simple écharpe) – ou le fameux capuchon Zoli (en ajustant le serrage juste comme il faut).
Ensuite, on n’oublie pas d’enfiler le bonnet AVANT de mettre bébé dans le dos. Ca, en même temps, on oublie une fois, mais rarement 2 😉
Idéalement, on est même accompagné d’un autre adulte qui peut compenser tous les problèmes de mouvements et de pertes de bonnet.. mais là c’est grand luxe.
Et puis on n’hésite pas à demander de l’aide aux gentils passants, qui se feront une joie de tripoter une tête de bébé (ça ne nous fait pas forcément plaisir à nous… mais entre deux maux…).

Le bonnet style péruvien de chez Baby Walz (ne pas oublier de faire le noued en bas si on choisit ce type de modèle...)
La veste de portage
J’ai largement détaillé ce point ici, mais il est vrai que le choix de la veste a grande importance. Il faut savoir à quoi on s’expose, en choisissant une ou deux ouvertures pour la tête…
La longueur / la souplesse de nos bras
Là, on ne peut pas y faire grand chose. Mais force est de constater qu’avec des bras longs, et souples, on arrive plus facilement à enfiler la veste, à la réajuster à l’arrière, voire à régler certains problèmes de bonnets. Ceci dit on s’améliore en pratiquant, et j’ai aujourd’hui une plus grande surface potentielle d’intervention qu’il y a un an 😉

On n'a pas tous la chance d'être aussi bien équipé !
Les bras – de bébé
Je parle ici des petits bras agités qui veulent absolument sortir du manteau. Je n’ai malheureusement pas de solution miracle, si ce n’est, pour sa conscience, de lui mettre un fin gilet qui ne le laissera pas ses bras en T-shirt par des températures hivernales…
Le choix du nouage – et l’âge et l’humeur de bébé
Si on porte en écharpe, il faut savoir qu’il est NORMAL d’avoir à réajuster le nouage en cours de portage. Or, avec une veste de portage, c’est beaucoup plus compliqué – voire impossible. Si on sait que son bébé a tendance à s’agiter, il vaut mieux choisir un nouage qui « bouge » moins – genre un double hamac – voire un autre porte-bébé. Les préformés, moins physiologiques certes, ont l’avantage de ne pas bouger du tout, et de ne nécessiter aucun réajustement en cours de route… Je précise que je parle ici de grands bébés, qui bougent dans l’écharpe, c’est moins problématique quand ils sont tout petits et généralement plus coopératifs (et plus dormeurs).
Pour ce point c’est l’expérience qui nous permettra de prendre des décisions éclairées 😉 Moi par exemple, je ne mettrai jamais ma fille en kangourou dos sous un manteau de portage. Je sais qu’elle a toutes les chances de décapsuler (pour les non initiés : que la poche sous ses fesses glisse et qu’il faille donc la replacer). Donc c’est double hamac obligatoire… ou chinois ou préformé.

Dans le dos, en Ergobaby
Sa tête…
Je précise qu’il s’agit la de la tête du porteur 😉 Non pas qu’elle soit physiquement gênante pour le portage, pas du tout, je pense ici à tout ce qu’on peut oublier en cours de route et qui peut se révéler embêtant ensuite. Par exemple, partir avec son bébé en oubliant d’emmener son manteau (le manteau de bébé)… alors qu’il pourrait être amené à vouloir / devoir descendre. Et là, on est bien bête. Le problème c’est que ce n’est pas forcément prévisible, et que se trimbaler un manteau pour rien, c’est pénible aussi.
Ou l’oubli, encore une fois, du bonnet.
Ou encore l’oubli des inserts dont on a besoin, quand on a une veste avec des parties amovibles… Parce que repartir sans bébé et un trou dans le dos, ça fait froid et niveau look force est de reconnaître que c’est pas le top.

Finalement, porter l'hiver est efficace aussi pour stimuler les connexions neuronales
Porter par dessus son propre manteau ?
Je crois qu’il y a des situations, quand on porte sur le dos, notamment des grands bébés, ou même si c’est moins physiologique, même si c’est moins confortable, il reste plus pratique de porter par dessus son propre manteau, en habillant l’enfant également avec son manteau naturellement. Par exemple pour de courts trajets, où l’on est amené à poser / reprendre bébé souvent et / ou rapidement. Par exemple pour aller chez la nounou. Il n’y alors qu’à descendre le bébé, et on repart, habillé normalement, sans avoir besoin de reconstituer une veste normale (en refermant les ouvertures ou rezippant ce qu’il faut).
Dans ce cas là, je trouve que l’écharpe n’est pas confortable : elle a tendance à glisser et le serrage est impossible (de toute façon la double épaisseur de manteau le rend peu utile, à des fins physiologiques en tout cas). Ma préférence va alors aux préformés, ou chinois en tous genres, plus facile à installer et qui bougeront moins. Attention néanmoins, avant l’installation et dans le cas des préformés, à desserrer les bretelles, sans quoi vous vous retrouverez coincé et il ne sera pas possible de glisser bébé tout habillé dedans 😉 Il est plus prudent également de vérifier, comme cela doit toujours être le cas mais à plus forte raison ici où vos sensations seront amoindries par les couches de vêtements, que l’enfant est bien assis au fond de la poche correctement déployée, et non juste en équilibre sur un bourrelet de tissu. Son manteau risque de se coincer aussi et de remonter sur son dos, et cela réclamera peut-être quelques contorsions pour l’installer à peu près correctement…

Encore un ergo, mais chacun dans son manteau
Et puis, je n’en parle pas car ce n’est pas l’objet de ce blog, mais la poussette peut servir aussi 😉
Conclusion
Mon intention n’est pas de décourager les porteurs hivernaux… ni de remettre en question ce que j’ai dit sur les principes du portages en hiver 😉 J’espère que ce ne sera pas l’effet produit ! D’ailleurs, malgré tout ça, j’ai porté intensément tout l’hiver, et il est rare que tout, en même temps, aille de travers. Bref, j’adore porter l’hiver… mais un petit moins que porter à la mi-saison !
Seulement je suis passée par quelques phases de découragement, de rage intense contre ces saletés de bonnets, ou encore de grands moments de solitude à souhaiter ardemment être équipée d’un gogo-gadgeto-bras (le rêve !!) et je me dis qu’il est utile de partager AUSSI ce type de récits en plus des belles photos qui font rêver. Ou alors c’est juste moi qui ne suis pas habile ?? C’est possible aussi, n’hésitez pas à partager vos propres expériences en la matière !
Comme je l’ai dit au début, la plupart de ces « difficultés » sont liées aussi au portage dorsal, avoir bébé devant les limite grandement. Mais, sincèrement, se priver de porter dans le dos, voire de porter tout court, pour « si peu », ce serait tout de même dommage 🙂